CMM DÉNONCE LA PRÉCIPITATION DU GOUVERNEMENT À ADOPTER LE CONTROVERSÉ PROJET DE LOI C-3

December 5, 2007

Montréal, Québec, Le 05 Décembre 2007- Le Conseil musulman de Montréal (CMM) condamne l'attitude du gouvernement conservateur qui essaie de précipiter le vote au Parlement du nouveau projet de loi C-3 sans offrir une opportunité d'intervention juste aux organismes concernés lors des séances de consultations publiques.

« Nous sommes extrêmement déçus de constater que le gouvernement essaie d'adopter ce projet de loi d'une façon précipitée et sans consultations publiques réelles » a déclaré Salam Elmenyawi, président du Conseil musulman de Montréal. « Au lieu de tenir un débat public sur ce controversé projet de loi, le Parlement essaie de réduire au silence et d'étouffer les voix de ceux qui seront le plus affectés par ces mesures draconiennes. C'est carrément irresponsable et immoral d'avoir perdu tout ce temps alloué par la Cour Suprême pour enfin bâcler l'adoption de ce projet de loi à la dernière minute."

CMM reproche au gouvernement conservateur de jeter le discrédit sur la justice, l'équité et la sécurité du Canada ainsi que celle des victimes des certificats de sécurité. Nous sommes inquiets par le fait que C-3 est tout simplement une copie conforme de l'ancienne loi des certificats de sécurité. Nous sommes particulièrement inquiets de l'ajout d'un « avocat spécial » qui ne sert qu'à jeter de la poudre aux yeux afin de légitimer une procédure inconstitutionnelle.

"Est-ce que la Cour Suprême a déclaré inconstitutionnelle l'ancienne loi pour qu'on la remplace par une loi similaire et aussi dangereuse? Le projet C-3 est fondamentalement injuste, discriminatoire et contrevient à la Charte canadienne des droits et libertés » a déclaré Elmenyawi.

CMM exige que le gouvernement demande un délai à la date limite du 23 février 2008 afin que C-3 soit correctement analysé et débattu. CMM fait remarquer que la Cour Suprême a déjà autorisé des délais dans des situations similaires dans le passé.

Nous incitons vivement le gouvernement à prendre en considération, avant toute prise de décision, les recommandations suivantes afin de pallier les lacunes de ce projet de loi et de faire respecter la justice fondamentale:

- Un délai à la date limite pour l'adoption du projet C-3 est requis, puisque plusieurs organismes communautaires n'ont pas eu l'opportunité de participer aux consultations publiques.
- En ce qui a trait à l'introduction de "l'avocat spécial", le gouvernement doit, au moins, éviter de répéter les erreurs qui ont été commises et reconnues en Grande Bretagne. Autrement, ce changement ne servira pas la cause de la justice et sera sans aucun effet sur la protection des droits constitutionnels et des libertés des personnes visées par le certificat de sécurité.
- Le projet de loi autorise l'utilisation de la preuve secrète; l'utilisation de la preuve obtenue de l'étranger (souvent obtenue sous la torture); l'utilisation de rapports d'information, de résumés de rapports basés sur des allégations vagues; l'utilisation du ouï-dire, des articles de journaux et toute source d'information non fiable et inadmissible dans les Cours de justice mais qui laisse planer les soupçons sur la personne visée par le certificat et le déclarer par la même occasion raisonnable. De telles pratiques doivent être interdites.
- Le projet de loi maintient une très faible norme de preuve pour confirmer le certificat (les motifs raisonnables de croire). Cette norme de preuve ne peut pas être tolérée dans une procédure dont l'issue est lourde de conséquences pour une personne innocente (association avec le terrorisme, stigmatisation de la personne et mise en danger de sa vie ainsi que celles des membres de sa famille. Il est impératif que la norme de preuve soit élevée au même niveau que dans les procès criminels.
- Sous le projet proposé, la déportation vers la torture demeure possible. Ceci est inacceptable, particulièrement au Canada. La déportation vers la torture doit être clairement interdite dans le nouveau projet de loi.
- Sous le projet de loi proposé, la détention indéfinie (emprisonnement, « résidence surveillée » ou conditions préventives) demeure une possibilité. Cette possibilité doit être clairement interdite dans le nouveau projet de loi.
- Afin de pallier les lacunes de l'ancienne loi, le comité parlementaire doit recommander que le nouveau projet de loi respecte la justice naturelle et les règles d'un procès juste et équitable, telles que le droit d'appel, le droit de connaître clairement les accusations qui pèsent contre la personne visée, le droit à une audition juste et impartiale, le droit de connaître les preuves retenues contre la personne, le droit de tester correctement et contre-interroger la preuve, l'application de règles de preuve justes et équitables, la présomption d'innocence, et le droit à une défense pleine et entière.
- Le Parlement doit complètement appliquer les recommandations du juge Dennis O'Connor dans la Commission Arar. De plus, le Parlement doit rapidement installer un système de garde-fous afin de prévenir les erreurs commises par les agences canadiennes de sécurité et afin d'éviter l'utilisation du profilage racial et des stéréotypes religieux.

Nous croyons qu'en abordant correctement les enjeux ci-dessus, nous allons aider à restaurer l'exécution ainsi que l'apparence d'impartialité de la justice, en plus de renforcer notre sécurité nationale. Il est important de protéger l'apparence de la justice en respectant les droits fondamentaux et en mettant en œuvre les garde-fous (checks and balances) nécessaires pour encourager le maintien de l'ordre et éviter de jeter le discrédit sur notre système de justice.

Le Conseil Musulman de Montréal (CMM) est une organisation qui chapeaute de nombreuses institutions musulmanes dans la grande région de Montréal. On compte plus de 175,000 musulmans à Montréal, près de 825,000 au Canada et 1,5 milliards à l'échelle mondiale.

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